Voilà déjà deux bonnes semaines que nous n'avons pas touché à notre clavier pour vous donner quelques nouvelles… et serons donc fidèles à ce bon vieil adage “Pas de nouvelles, bonnes nouvelles”. En effet, nous nous portons comme un charme!
Nous avons quitté l'Europe continentale il y a presque quinze jours maintenant, ce qui a apporté son lot de dépaysement et même d'exotisme.
Néanmoins, nous ne passons pas sous silence nos derniers moments passés au Portugal et revenons sur les temps forts que nous avons vécus à Lisbonne et lors de notre traversée jusqu'à l'archipel de Madère. Nous espérons que cela vous apportera un peu de baume au cœur, en ces temps particulièrement troublés.
Lisbonne, une capitale européenne à la douceur de vivre
L'arrivée à la voile dans une capitale européenne
Pour ne pas vous le cacher, nous avons eu un coup de cœur pour Lisbonne! Oui, un autre coup de cœur diriez-vous… Cela tombe bien, car Lisbonne est proche de Nazaré, l'autre ville dans laquelle nous nous verrions bien poser nos valises!
Atterrir à Lisbonne en bateau a été un moment d'une belle intensité. Symboliquement, déjà, car arriver à la voile dans une capitale européenne est signe que nous avons fait une jolie route. Esthétiquement, ensuite, tant la remontée du Tage et le passage devant des monuments phares de la ville étaient grandioses.
Tout en tirant des bords, la tour de Bélem, le monument aux Découvertes et le pont du 25 avril se sont offerts à nous, nous insufflant cet esprit d'aventure propre aux grands navigateurs. Il ne vous aura pas échappé que le pont du 25 avril a quelques similitudes avec le Golden Gate… Si, dans une fulgurance, nous avons cru arriver dans la baie de San Francisco, nous avons vite réalisé que cette impression était justifiée: sous la dictature de Salazar, le pont a été commandé à la même société de génie civil américaine que celle qui a bâti le Golden Gate. D'abord baptisé “Pont Salazar”, celui-ci a été renommé “pont du 25 avril” suite à la révolution des œillets, qui a renversé la dictature un certain…25 avril 1974.
Quelle n'a pas été notre surprise, une fois le pont passé, de découvrir un Christ Rédempteur majestueux, sur l'autre rive du Tage, face à Lisbonne! La construction du Cristo Rei portugais (1949-1959) est bel et bien inspirée du monument mythique de Rio de Janeiro, construit pour sa part en 1934.
Une fois remis de nos émotions, place à l'aspect pratique. Il nous faut trouver une marina prête à nous accueillir. Si la plupart des bateaux s'arrêtent à Cascais à l'embouchure du Tage, nous souhaitons être en centre-ville. Suite à de multiples tentatives d'appel à la VHF, nous venons à bout du responsable de la marina Doca de Alcantara, qui daigne enfin nous répondre. Il nous propose une place pour “une nuit, pas plus”, que nous avons heureusement transformé en séjour à la semaine. La bonne nouvelle, c'est que les “batocopains” français que nous connaissons nous y ont rejoints et que l'on en a rencontré de nouveaux! Il semblerait qu'une technique “French style” pour arriver dans les marinas portugaises ait fait ses preuves: c'est un fait, il est rare que les marinas portugaises répondent à la VHF. En tant que bons Français, nous avons vite compris que pour avoir une place, mieux valait ne pas demander la permission du maître de port mais s'installer à une place libre et négocier après. Cette méthode quelque peu cavalière fonctionne à chaque fois! Parfois, il ne sert à rien d'être trop poli…
Après avoir fait escale à Nazaré et Peniche, tous deux de paisibles villages dynamisés par la culture du surf, la marina de Lisbonne nous plonge dans l'ambiance citadine. Le bruit de la ville duquel nous nous étions éloignés nous happe les oreilles: avions survolant la ville, bourdonnement du trafic sur le pont du 25 avril, défilé de jet-skis, nous retrouvons la ruche grouillante et vibrante propre à la vie en ville.
La douceur de vivre incarnée: une capitale qui prend son temps
La vie à Lisbonne est très agréable. Tout d'abord, la ville est pittoresque et très aérée, ce qui est sûrement dû à l'excellent aménagement des bords du Tage (piste cyclable, cafés, restaurants, parcs…) ainsi qu'à la succession des sept collines qui la composent. A Lisbonne, on se croirait un peu à Marseille, la circulation et le sentiment de chaos ambiant en moins. Aux quartiers résidentiels dans lesquels on ne se croirait pas en ville se succèdent des quartiers plus animés, toujours égayés par les teintes chaudes des maisons et le linge suspendu au balcon. Se perdre dans Lisbonne est un délice: de multiples ruelles nous conduisent de jolies façades à des places cachées, sur lesquelles le temps semble s'être arrêté.
Lisbonne, c'est une vie de quartiers à découvrir : déambuler sans but précis conduit à d'agréables surprises.
Cette ville n'est pas oppressante: peu de boulevards assourdissants nous étouffent, beaucoup de parcs agrémentés de kiosques dans lesquels s'attabler pour prendre un café nous attirent. La lenteur voulue et assumée de Lisbonne rend le quotidien doux: nous pourrions facilement nous y projeter.
Nous avons eu la chance de rencontrer - grâce à une amie des parents de Kévin - Lucas et Diana, un couple franco-portugais fraîchement marié, résidant à Lisbonne. Rien de tel que les conseils des habitants de Lisbonne pour découvrir les bonnes adresses! En plus d'avoir passé une excellente soirée chez eux à faire mutuellement connaissance, Lucas nous partage son expérience de 6 mois sur son voilier en Méditerranée, ainsi que sa fin tragique: le bateau a coulé dans un port de Lisbonne, suite au malencontreux départ de feu sur le bateau d'à côté! Nous repartons ravis de notre soirée, avec une adresse fort sympathique d'un restaurant simple et délicieux, idéal pour fêter son 33ème anniversaire.
Lors de notre semaine à Lisbonne, nous battons le pavé pour découvrir l'historique quartier de l'Alfama près du château et de la cathédrale, Chiudo, Baixa, Barrio Alto, Bélem, à chaque fois charmés par le plaisir visuel des façades ensoleillées.
Aujourd'hui, nous avons envie de vous parler plus spécifiquement de Bélem, notre quartier favori, bien qu'un peu excentré du centre-ville. La richesse culturelle y est impressionnante et témoigne du siècle d'or portugais. Situé sur les bords du Tage, il abrite de nombreux points d'intérêt culturels ainsi que la maison historique des Pastéis de Belem.
C'est bien l'esprit des Grandes Découvertes qui y règne, apportant avec lui un vent de fraîcheur et un esprit d'aventure à l'histoire d'une nation.
Le Monument aux Découvertes en impose lorsque l'on arrive à la voile: ex-voto aux héros portugais de la période des grandes découvertes construit en 1940, le monument représente un fragment de navire prêt à partir en mer. A son bord, 34 figures y sont représentées: Henri le Navigateur, le parrain des expéditions maritimes des découvreurs portugais, le roi Manuel Ier son neveu, Vasco de Gama - le découvreur de la voie vers l'Inde, le découvreur du Brésil Pedro Cabral, la mère d'Henri le Navigateur, le poète Luis de Camoès, et certains autres de leurs copains.
Le monastère des Hiéronymites (en référence à Saint Jérôme, ordre religieux de charisme contemplatif particulièrement présent dans la péninsule ibérique) est l'un des rares monuments à ne pas s'être effondré lors du terrible tremblement de terre qui a ravagé la ville en 1755. Financé par Henri le Navigateur sur demande de Manuel Ier pour remercier Dieu du succès des expéditions maritimes portugaises, le monastère fut construit au XVIème siècle, et les moines de l'ordre des Hiéronymites y vécurent jusqu'en 1834, l'année de la dissolution de leur ordre.
Mêlant ornements orientaux et décorations marines dans un style gothique, l'esprit manuélin se reconnaît aussi sur la Tour de Bélem, d'abord forteresse, puis phare et enfin prison.
Passionnés par l'audace qui régnait lors des excursions d'outre-mer, c'est naturellement que nous avons visité le Musée de la Marine. Il abrite en son sein des maquettes des bateaux du XVIème siècle. Nous tirons notre chapeau à tous ces navigateurs partis explorer les océans en quête de nouvelles terres, sans certitude de retour aucune…
Nous passons d'agréable journées à Lisbonne, à rouler à vélo le long du Tage et à arpenter les rues pleines de vie de la capitale. Paraît-il que nous avons beaucoup de chance car Lisbonne est à nous: d'habitude, la ville est envahie de touristes qui s'agglutinent dans tous les endroits remarquables. Avec le Covid, la capitale est désertée de cette invasion de masse et de moins en moins contrôlée, ce qui nous rend bien privilégiés pour la découvrir.
Avant de quitter Lisbonne, nous découvrons un lieu insolite et inspirant grâce à la recommandation de Laurent, le skipper du batocopain Khaïma: la LX Factory, une ancienne grande fabrique de tissus reconvertie en un village à la mode. Street-art, artisanat, concerts, créateurs, stylistes, restaurants et bars à la déco originale, espaces de co-working pour entrepreneurs se côtoient dans les anciens bâtiments industriels reconvertis en un temple de la création. Résolument alternatif, profondément underground, complètement bobo, ce lieu a quelques allures de Berlin tout en nous rappelant les spots parisiens que nous aimons beaucoup: Les Grands Voisins, le Comptoir Général, la REcyclerie, Ground Countrol…tous ces lieux profondément vivants, où la créativité bat son plein. Par chance, nous tombons sur un concert de musique brésilienne. Nous réalisons que cela fait bien longtemps que nous n'avons pas écouté de musique en plein-air! Nous savourons le rythme chaloupé des artistes qui entonnent des tubes traditionnels ou commerciaux, tout en s'échauffant la voix d'une caïpirinha. Puis, nous nous laissons tenter par une spécialité locale: le frango assado (poulet grillé).
C'est dynamisés par ce bouillonnement culturel que nous nous apprêtons à quitter Lisbonne et l'Europe continentale. En chemin, nous tombons même sur un restau vintage & healthy - tout ce que j'aime! - dans lequel nous peaufinons notre route en fonction de la météo. Avides de reprendre la mer, nous sommes plein d'énergie et d'inspiration pour faire de cette traversée un moment fort et mémorable.
Lisbonne-Madère: une grande traversée pleinement réussie
Une traversée vers des latitudes plus chaudes
Sur les pontons, nous croisons beaucoup de bateaux de voyage. Certains sont de vrais baroudeurs: depuis des années, ils sillonnent les mers du globe. Fanny en fait partie. C'est une femme éprise de liberté, qui entre deux voyages en bateau a élevé avec son mari Maho des chèvres non pas dans le Larzac mais dans les Pyrénées. Lorsqu'elle me confie: “Parfois, on n'a pas envie que certaines traversées se finissent”, cela m'interpelle. Derrière l'inconnu et l'inconfort du grand large, je pressens qu'une autre dimension est possible, même si je ne l'ai que brièvement entrevue. Cette autre dimension, c'est celle où le temps s'étire, où le ciel, la lune, le soleil et les étoiles nous couvrent de leur majesté, celle où l'on fait corps avec son bateau et les éléments, où l'on se dissout dans le paysage environnant. Pour cela, il faut le temps de dépasser cette résistance de terriens, celle où l'on est calqué sur le temps des horloges, dans la maîtrise de notre planning, des événements, de chaque parcelle de notre journée. Il faut l'espace pour “lâcher” nos repères et nos habitudes pour se couler dans un autre rythme, se laisser façonner par lui.
Cette traversée entre Lisbonne et Madère, nous l'attendons avec une pointe d'impatience. Une fois de plus, la distance s'allonge: 513 milles (+ de 950km) nous attendent, soit 3 nuits en mer. Pour qu'une traversée soit réussie, nous savons qu'il est important de bien la préparer. La météo, d'abord: nous guettons la fenêtre anticyclonique idéale. Les vents portants nous pousseront jusqu'à Madère, le bateau à plat. Plus que le vent, nous avons compris que c'est surtout l'état de la mer qui importe. Il ne faut pas partir trop proche d'une dépression, la houle ne s'étant pas encore calmée. Les conditions de cette traversée s'annoncent idylliques: un vent de 4 Beaufort bien établis orientés Nord-Est, une faible houle. Maintenant que nous connaissons d'autres navigateurs ayant un programme similaire, nous naviguons en meute. A + / - 24h, nous savons qu'un autre voilier est en route pour la même destination, ce qui est rassurant pour nous.
Lorsque nous trouvons la bonne fenêtre météo, la veille, c'est le branle-bas de combat: lessive, lavage intégral du bateau, préparation du bateau, avitaillement, cuisine, routage, plein d'eau…ce rituel s'automatise, et nous le faisons avec bonheur.
Je suis toujours frappée par le contraste entre la préparation d'un départ et le calme qui se fait une fois les voiles établies. Avant de partir, la frénésie est à son comble: on court partout, on se répartit les tâches, on optimise, on sécurise, on anticipe.
Une fois en mer, on revient à un état naturel beaucoup plus instinctif, dans l'instant. Le dénuement progressif s'opère, il peut alors nous submerger. Nous redescendons à la base de la pyramide de Maslow. En mer, nous en revenons à des besoins basiques: bien se vêtir pour ne pas avoir froid, se nourrir convenablement, dormir, rester propre et garder le bateau propre, être en sécurité.
Cette navigation, nous la faisons au portant: sous GV haute de jour, avec un ris la nuit en prévention, sous génois tangonné. Pour la première fois, nous vivons une traversée au large sereine et joyeuse. Beaucoup mieux amarinée et aidée par une pilule magique qui aide à lutter contre le mal de mer (merci Caroline et François!), je n'ai pas été malade et ça, ça change carrément la donne !
Ces 513 milles, nous les parcourons en 74h, soit 3 jours et 2h, ce qui est une moyenne tout à fait honorable! A sept noeuds, nous avancions en sécurité, jamais en surpuissance. Le vent devient de plus en plus chaud: nous partons emmitouflés comme en plein-hiver pour les quarts de nuit, nous finissons en short, vêtus d'une simple polaire. Nous sommes sous les mêmes latitudes que Casablanca, ça sent de plus en plus le sud…
Si cette traversée se passe bien, c'est parce-que nous comprenons peu à peu les clés pour que la vie au large se déroule au mieux: se donner un rythme de quarts réguliers, créer des rituels, prendre les repas en commun. Cette fois-ci, nous avons un peu plus le temps que lors du Gascogne pour nous adapter au rythme des quarts et de la mer, sans nous mettre la pression pour “ne pas arriver trop fatigués”. Nous savons que nous resterons immobilisés à Madère pour un test Covid à notre arrivée, ce qui nous laissera le temps de nous reposer.
Les occupations pendant une grande traversée
Regarder
Par nature, une grande traversée est contemplative. Apprendre à ne rien faire, être pleinement là, perdre la notion du temps, se laisser absorber par l'immensité bleue…à l'action permanente de nos vies trépidantes succède le calme.
Admirer l'état de la mer, le jeu des vagues et leurs couleurs changeantes, le dégradé du ciel - arborant une large palette allant du rose-orangé au violet irisé - la densité et la forme des nuages: sous couvert de similitude, le paysage est en réalité très changeant.
Permanent et impermanent à la fois. Nous sommes fascinés par la puissance sauvage de la mer, qui se révèle de plus en plus intense au fil de la traversée.
Bleu-roi, elle nous hypnotise. Seraient-ce nos lunettes? Nous les enlevons: non, l'eau est bien d'une couleur électrique, encore plus vive, nous rendant par effet miroir toujours plus vivants.
Pêcher
Cette fois-ci, nous croisons peu de cétacés, mais décidons de tirer des océans la richesse dont elle recèle. C'est ainsi que nous mettons à l'eau la ligne “grand large” pour pêcher à la traîne. Les circonstances devraient être favorables: les poissons seront aveuglés par le soleil venant de face, même si nous ne sommes ni le matin, ni le soir. Après trois heures de patience à nous demander si notre ligne plonge assez, est assez longue, nous jetons un énième coup d'oeil à l'arrière du bateau, et il nous semble bien que ça frétille! Tout excités, nous remontons la ligne et le poisson qui a mordu à l'hameçon. C'est une bonite, soit un thon rouge, et de taille généreuse en plus! Une fois ramené à bord, nous devons faire face à la réalité: pour le mettre dans notre assiette, il va falloir le tuer.
Là, l'image sera plus puissante que tous les mots, nous vous laissons découvrir par vous-mêmes la force de notre ignorance et gaucherie en la matière…
Une fois pêché, nous voilà dans de beaux draps. Ne faisons pas les fines bouches et mettons la main à la pâte! Ou plutôt, dans les tripes: vider le poisson est un apprentissage en soi. Tout comme le cuisiner. Si ce pauvre thon a fini en filets, nous saurons pour une prochaine fois qu'il vaut mieux en faire des steaks. La pêche est un bon apprentissage pour plonger nos mains de citadin dans le sang, les boyaux et la poiscaille. C'est ce qu'on voulait pour ce voyage: mettre les mains dans le cambouis, arrêter d'être “hors sol” avec tout qui nous est servi sur un plateau moyennant quelques euros. Nous sommes servis! Ne soyons pas timorés, le poisson servi dans nos bons restaurants a bien eu une vie et une fin. Manger le poisson que l'on a tué de ses mains a quelque chose d'effrayant et de terriblement jouissif.
Cuisiner
Si je préfère préparer en amont d'une traversée les plats pour la première journée - afin de ne pas me donner le mal de mer en faisant sauter les crêpes à l'intérieur - je découvre aussi que cuisiner en mer est un vrai plaisir et une activité qui occupe bien! Grâce à notre référence “La bible de la cuisine à bord”, nous préparons des petits plats adaptés aux contraintes de la cuisine en mer (mouvement, avitaillement, gaz limité, matériel sommaire).
Là encore, nous suivons la liste des menus affichée à côté de la cuisinière: taboulé, cake salé, pot-au-feu, tourte aux épinards, risotto à la tomate, soupe minestrone…les petits plats que nous nous concoctons nous garantissent un moral d'acier.
Nous avons presque pris trop de nourriture pour nous permettre de remettre la ligne de traîne à l'eau. Nous pêcherons un autre jour, et achèterons une bouteille de vodka à bas prix pour soûler le poisson avant de mettre fin à ses jours…
S'inspirer
Merci aux nombreuses suggestions de podcasts que nous avons reçues de votre part! Nous en avons téléchargé un grand nombre avant de partir, et ils ont bien égayé notre traversée! Avec en tête de liste: Sismique, Splash, Profils d'Arte Radio, Les Braqueurs d'Arte Radio, Les pieds sur terre, Lucette et la vie… Prospective, témoignages, intrigues, documentaires, musiques du Cap-Vert et de la Martinique, figures du grand-banditisme, nous avons voyagé et réfléchi avec délectation lors de nos nuits à naviguer! Une fois la nuit tombée, nous avons également apprécié nous plonger dans la 4ème saison du Bureau des Légendes avant de prendre nos quarts, sorte de rendez-vous avant que nos chemins se séparent: moi, pour aller dormir, Kévin pour prendre le 1er quart de nuit. Nous souhaiterions tester un livre audio pour varier les plaisirs: si vous en connaissez un que vous avez apprécié, n'hésitez pas à nous le recommander! De préférence sur une plateforme autre que celle d'Amazon, si vous avez :)
12h de nuit, magie & sécurité
On n'y peut rien: quand la nuit tombe, une sorte d'angoisse inexpliquée s'abat sur nous. Cela est d'autant plus vrai que la nuit s'allonge: le soleil se couche à 19h30 pour se relever à 7h30 le lendemain. Cette appréhension, nous cherchons à l'apprivoiser. Réduire la surface des voiles est indispensable pour éviter les manœuvres de prise de ris la nuit: nous naviguons en légère sous-puissance, mais avançons tout de même à 6 nœuds.
La lune n'est pas pleine, ce qui signifie que la nuit est ténébreuse jusqu'à minuit Nous trouvons le rythme de quarts qui nous convient: Kévin prend les quarts de 21h-00h et 3h-6h , tandis que je prends le quart de 00h-3h et 6h-9h. Etant une couche-tôt et une lève-tôt, ce rythme me convient bien. Une bonne sieste dans l'après-midi, et nous voilà reposés!
Cette fois-ci, nous nous autorisons à faire des micro-siestes pendant nos quarts: nous dormons sur des tranches de 20 minutes.
Le réveil nous rappelle à cet intervalle de vérifier qu'il n'y ait personne à l'horizon ou que les conditions n'aient pas changé. De même, nous réglons l'alarme AIS afin d'être informés de tout bateau qui serait en route de collision avec nous à moins de 3 milles du bateau. Au final, nous croisons une quinzaine de cargos les deux premières nuits et un pêcheur, mais pas de voilier.
Nous avons beaucoup moins subi nos quarts de nuits que lors de la traversée du Golfe de Gascogne, et y avons même pris beaucoup de plaisir à les assurer. Personnellement, démarrer mon quart avec une bonne Cumbia en prenant la barre sous un ciel étoilé était une expérience énergisante! Rapidement, nous nous sentons moins fatigués et vaseux: nous en avons profité. Il reste encore à se détendre lorsque l'on dort à l'intérieur tandis que l'autre est dehors: le bateau est une caisse de résonance, on a toujours l'impression que celui qui est dehors brave une tempête déchaînée tant ça crisse, grince, brinquebale et craque à l'intérieur. Il suffit de passer la tête par le hublot pour se rendre compte que tout est stable et clair, que l'autre est bien attaché à la ligne de vie avec sa longe, et qu'il est temps de sombrer dans 2h30 d'un sommeil lourd et sans rêves pour récupérer…
Terre en vue!
Comme à chaque fois que nous apercevons une côte au loin, nichée dans la brume, la joie est réelle. Nous l'avons fait, nous avons réussi! L'atterrissage est prévu à Porto Santo, la seconde île de l'archipel de Madère. Plus l'île se rapproche, plus l'excitation est à son comble. Le dépaysement est total: sur ce bout de caillou volcanique, la terre est aride et pelée. La plage dorée est sublime, les palmiers confèrent une touche exotique à ce décor. Nous en avons la confirmation: le voyage en terres inconnues démarre ici, dans ces îles sauvages, où un vent chaud nous insuffle une énergie insulaire nouvelle.
Nous vous retrouvons dans un prochain article pour vous conter les merveilles de Madère!
Portez-vous bien d'ici là, où que vous soyez.